Tremblement de terre, faut-il annuler ses vacances au Maroc ?

Presque neuf ans après, je reprends le clavier avec un titre presque identique : faut-il annuler ses vacances au Maroc après le tremblement de terre à Marrakech ?

A l’époque, la menace était lointaine, puisqu’il s’agissait de l’enlèvement d’un Français en Kabylie. Et pourtant, comme après chaque attentat terroriste, les réservations chutaient à grande vitesse, entre les gens qui croyaient que Fès était dans le désert « daeschiste » et les autres.

En 2011, d’ailleurs, j’avais déjà posé la question après l’attentat qui avait frappé le Café Argana sur la place de Marrakech.

Alors en voyant les demandes pressantes faites par les Marocains suppliant les touristes de ne pas annuler leurs vacances, tout va bien à Marrakech, ce que vous voyez ne montre pas la réalité de la ville, les destructions et les morts sont ailleurs, et tout en comprenant ces professionnels du tourisme qui ont enfin pu recommencer à travailler après les années coronavirus, je me suis demandée ce que mon ancien moi, celui qui travaillait, dirait aujourd’hui ?

Et ma réponse serait, un peu plus que lors de ces deux événements, « ça dépend ».

Ce « ça dépend » en fait, est basé sur plusieurs facteurs.

Le risque zéro n’existe pas et n’a jamais existé

Les tremblements de terre au Maroc, j’en ai « connu » (expérimenté ou vu) six ou sept. Le Maroc est soumis à un risque sismique « moyen », mais comme dans toutes les situations où on évalue statistiquement une probabilité, les dés sont relancés à chaque fois.

Autrement dit, à la différence d’un attentat terroriste, le fait qu’il y a eu un tremblement de terre ne veut pas dire que la foudre ira frapper ailleurs dans les mois qui viennent, et qu’il n’y en aura pas un la semaine suivante.

Au contraire, tous les spécialistes le répètent, il y a de fortes probabilités que, dans les semaines qui viennent, le Maroc connaisse d’autres secousses liées à des réajustements. Et de fortes probabilités que ces secousses soient beaucoup plus faibles (comme le second séisme qui a eu lieu une demi-heure après celui de Marrakech, et qui était, comparé à lui, une douce brise printanière).

Fortes probabilités donc d’avoir des faibles secousses.

Donc exactement le même risque que vous preniez « avant » en venant en vacances au Maroc (ou en Turquie, ou à Naples où le Vésuve et les champs phlégréens inquiètent un peu beaucoup les spécialistes).

En terme de risque, la seule différence avec la semaine dernière, c’est que vous en êtes conscient.

Ça dépend de quand vos vacances sont prévues

Annuler des réservations faites pour Noël, pour le printemps n’a a priori aucun sens. A ce moment là, les conséquences du séisme de Vendredi auront été absorbées, dans tous les sens du terme.

Pour la semaine prochaine, c’est un peu différent.

Et (cf. paragraphe suivant) dans les grandes villes ou les grands complexes touristiques, vous êtes à peu près en sécurité : depuis le tremblement de terre d’Agadir, le Maroc a peu à peu mis en place des normes de constructions anti-sismiques, généralisées depuis les années 2000. Les pauvres, les « petites gens » ne les appliquent pas, par manque d’argent et de connaissance, mais croyez-moi, un grand hôtel le fait. 

Mais si vous aviez prévu de partir dans ce sud montagneux que j’ai tant aimé, soyons très honnête, cela peut encore trembler.

Ça dépend de ce que vous aviez prévu de faire

Donc qu’aviez-vous prévu de faire ? Vous dorer la pilule sur une plage à Agadir, faire du surf à Essaouira, visiter Rabat … allez-y.

Passer une semaine à visiter le Maroc, en franchissant des cols, par exemple en faisant le circuit classique qui va de Marrakech à Merzouga et retour ? Ou aller à Fès et redescendre ensuite vers le Tafilalt ?

Dans ce cas, deux choses sont à prendre en compte :

1. le risque, réel et statistiquement plus haut que la normale, personnellement j’ai une attitude assez fataliste sur le thème « Ce soir à Samarcande », mais il faut aussi éviter d’aller juste là où c’est le plus risqué
2. Avez vous réellement envie de traverser des paysages dévastés, de croiser des gens en deuil et d’encombrer pour votre plaisir des routes qui devraient être dédiées aux secours, en tout cas à très court terme ?

Demander aux professionnels auprès de qui vous aviez réservé ce qu’il en est réellement. Envisagez la possibilité de reporter ou de détourner votre voyage, sans annuler. J’ose espérer qu’ils auront tous l’honnêteté de vous donner le bon conseil.

Ça dépend de vous

Enfin, finalement, tout dépend de vous.

Dans le cas des attentats, je disais que même s’il n’y avait pas de risque, il n’y avait pas de sens à se pourrir les vacances en s’obligeant à venir dans un endroit où on est stressé par la peur.

Il n’y a pas plus de sens à s’obliger à venir « par solidarité » dans une ambiance qui est lourde – et c’est normal.

Non, la vie n’est pas redevenue comme avant à Marrakech.

Matériellement, oui, mais les gens qui travaillent dans le tourisme, les femmes de ménage, les cuisinier(e)s, les gardiens, les guides aussi ont souvent de la famille durement touchée, ne savent toujours pas, parfois, ce qu’il est advenu de leurs proches.

Un propriétaire de riad qui a beaucoup fait parler de lui a suggéré que tous les touristes se transforment en bénévoles.

Ben voyons… envoyons dans des villages reculés des gens qui ne sont pas formés, qui n’ont aucune expérience, qui ne parlent pas arabe.

Vous avez le droit d’être touchés par cet événement et vous avez le droit de ne pas vouloir faire la fête ou simplement vous la couler douce au milieu d’une population aussi tristement touchée.

Pour conclure

Faut-il annuler ses vacances à cause du séisme au Maroc ?

Dans la région touchée, à très court terme, si votre programme impliquait de visiter cette région, oui.

A horizon de trois ou quatre semaines, non, mais peut-être faudra-t-il les réaménager.

Et en attendant, il y a d’autres façons d'aider.

(Toutes les photos de cet article illustrent des endroits qui ont été détruits).

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