Un mariage mixte, c’est tout sauf simple.
Au niveau individuel, il s’agit de faire cohabiter harmonieusement deux cultures, deux systèmes de références différents. Il s’agit aussi de choisir un lieu de résidence, généralement le pays d’un des deux conjoints, ce qui veut dire que l’autre sera plus éloigné de sa famille, susceptible d’avoir le mal du pays, etc.
Mariage mixte : deux systèmes juridiques différents
Au niveau juridique, c’est pareil. Il s’agit de permettre l’application de deux systèmes juridiques plutôt différents, puisque celui du Maroc est religieux (musulman ou juif, selon les cas), tandis que celui du conjoint étranger sera, dans la plupart des cas, laïque. Et croyez-moi, cela va bien au-delà du fait de passer devant Monsieur le Maire avant Monsieur le Curé !
Heureusement, il existe des conventions entre le Maroc et la France, ainsi qu’avec la plupart des autres pays, qui organisent le cadre de cette coexistence juridique. Néanmoins, cela reste assez complexe, surtout quand cela se passe mal et qu’on en arrive au divorce.
Chaque pays doit reconnaître le mariage
Pour simplifier, je prendrai comme exemple le Maroc et la France, mais les principes restent les mêmes pour les autres pays.
Vous vous êtes mariés, en France ou au Maroc (ou en Argentine, si vous résidez tous les deux là-bas, histoire de faire simple). Votre mariage a été enregistré par les autorités du pays où il a eu lieu.
Vous êtes mariés, mais vous devez aussi faire enregistrer votre mariage dans l’autre pays.
Autrement dit, si vous avez fait un mariage civil à la mairie, en France, vous devrez ensuite aller vous marier une « seconde fois » dans un consulat du Maroc, selon le rite musulman et la loi marocaine.
Si vous vous mariez au Maroc, de la même façon, vous devrez faire enregistrer votre mariage à « Nantes » (au Service Central d’État Civil du Ministère de l'Europe et des Affaires Étrangères).
Une fois que l’enregistrement est fait, vous êtes pleinement mariés. L’état français reconnaît votre mariage, toutes les obligations et tous les avantages qui vont avec.
Mais attention, tant que l’enregistrement n’est pas fait, vous êtes quand même un peu mariés.
Par exemple, vous ne pouvez pas décider de vous marier à nouveau avec un Français, sans avoir divorcé. Certes, l’État français pour l’instant vous considère comme célibataire, mais si votre second époux découvre votre mariage au Maroc, il peut vous traîner devant le tribunal français pour bigamie. Et l’État français, informé de votre mariage au Maroc, lui donnera raison.
En l’absence d’enregistrement dans le pays d’origine, un mariage contracté dans un autre pays impose quand même ses obligations aux deux parties contractantes.
Quelle loi s’applique à votre mariage ?
Ce n’est pas obligatoirement la loi du pays où vous vous êtes mariés, mais la loi de votre premier pays de résidence commune.
Sauf si vous avez décidé, dans votre contrat de mariage, de choisir la loi qui s’applique pour votre couple. Et que chacun des pays vous en reconnait la possibilité.
Ce qui veut dire, concrètement, que si vous vous mariez au Maroc et que vous y restez vivre un an ou deux, puis que vous vous installez en France et que, finalement, vous décidez de divorcer, théoriquement, le juge français devrait appliquer la loi marocaine.
Ou vice-versa.
Ce qu’un juge marocain ne fera pas, dans l’autre sens, car la loi française est, sur certains aspects, contraire à la loi musulmane et donc à la loi marocaine.
Un petit verre de thé pour faire passer le mal de tête qui monte sous votre crâne ?
Où se marier ?
Vous n’avez pas beaucoup de choix. Vous devez vous marier, au choix :
-
- dans le pays d’origine d’un des deux mariés
- dans le pays de résidence d’un des deux mariés
- et vous devez vous marier devant les autorités du pays choisi (le maire en France, les adouls au Maroc).
Sauf si vous êtes deux français résidant au Maroc, c’est le seul cas où vous pouvez vous marier au consulat.
Les « mariages » au Maroc entre Français sont en réalité des réceptions, mais tous les papiers sont faits avant.
Connaître la loi qui s’applique ou qui pourra s’appliquer à son mariage
Le code de la famille marocain a été profondément modifié par la promulgation de la nouvelle Moudawana (code de la famille), en 2004.
A ce code de la famille se rajoute l’interprétation des juges, particulièrement en cas de divorce.
Le Maroc est aujourd’hui à mi-chemin entre une législation islamique stricte et une législation beaucoup plus protectrice de la femme. Si un jour vous allez vivre dans un autre pays musulman moins libéral, votre mariage peut être régi par des lois beaucoup plus rigoureuses. Même au Maroc, certains principes fondamentaux restent, comme par exemple l’impossibilité pour une femme d’emmener ses enfants à l’étranger sans l’accord de son mari.
Le contrat de mariage peut comprendre des clauses qui protègent la femme, qui donnent à l’avance des autorisations, ou qui interdisent à l’un ou l’autre des époux de faire des choses spécifiques (comme prendre une seconde épouse). Pour pouvoir les faire inscrire, il est essentiel de savoir « quoi ».
Le contrat de mariage
Le contrat de mariage est essentiel. On a souvent tendance à le négliger, mais c’est une erreur. Le « pre-nup » comme disent les Américains est le moyen de décider de façon précise quelles seront les modalités légales qui seront appliquées dans telle ou telle circonstance. Il permet aussi d’aplanir à l’avance des difficultés, voire même de régler des problèmes d’organisation.
En cela, il mérite un article à lui tout seul.
En savoir plus
- France : elle fait annuler son mariage car son mari était déjà marié au Maroc
- Mariages mixtes Attention aux statistiques officielles
- Au Maroc, une femme condamnée à deux ans de prison ferme pour adultère
Mariée et divorcée légalement, Hind Achabi est pourtant condamnée pour adultère. Les complexités d'un divorce international.
>
Une coquille ou une erreur de syntaxe ? Vous pouvez sélectionner le texte et appuyer sur Ctrl+Enter pour nous envoyer un message. Nous vous en remercions ! Si ce billet vous a intéressé, vous pouvez peut-être aussi laisser un commentaire. Nous sommes ravis d'échanger avec vous !