Même si l’odeur âcre des pétards entre par la fenêtre ouverte, il me semble qu’Achoura cette année a été plus calme que les précédentes.
Moins de pétards – en tout cas dans notre quartier – et pas de débordements interdits parce qu’il n’y a plus de confinement.
Moins de dépenses aussi. Quand on ne sacrifie pas le mouton, on ne peut pas non plus acheter des jouets ou des habits neufs aux enfants. Et pour ceux qui ont sacrifié leur animal, les prix extrêmement élevés (5.000 à 6.000 dirhams dans les grandes villes) ont dû drainer totalement le budget festif.
C’est la période des grandes vacances aussi
Les familles qui le peuvent ont fui Casablanca. Celles qui ne le peuvent pas ont d’autre soucis que les pétards d’Achoura.
Aussi ce calme Bidaoui est-il peut-être réservé à la capitale.
Baba Achour et les feux de joie
C’est lors de ces fêtes traditionnelles que je ressens particulièrement la différence de mode de vie entre Casablanca, d’autres grandes villes comme Marrakech ou la campagne.
Ici, en dehors de la medina ou des quartiers populaires, pas de son de taarija ou de derboukas (petits et grands tambourins avec un cylindre en céramique). Les pétards ont faiblement commencé hier soir, mais on n’a pas entendu les grands débordements habituels pendant la semaine précédente (à tel point que j’avais presque oublié que c’était Achoura).
J’avoue que cela me manque…
La tradition de Baba Achour, un vieillard faisant le tour des maisons pour demander des bonbons à redistribuer, version locale d’un rite très ancien qu’on retrouve ailleurs dans la fête d’Halloween passe peu à peu du statut de tradition vivante à celui d’événement « préservé » par des associations. C’est pareil pour les grands feux de joie qu’on pratiquait autrefois et qui ne sont vraiment pas adaptés au mode de vie citadin.
Le Covid a-t-il tué aussi les pétards d’Achoura ?
La grande majorité de ces explosifs interdit passaient en contrebande, aux postes de Ceuta et Melilla. La réouverture aux transfrontaliers marocains, le 31 mai de cette année a été très restreinte, limitée aux personnes ayant des contrats de travail de l’autre côté. La contrebande, autrefois tolérée, est désormais définitivement interdite.
Donc sans approvisionnement, il devient plus difficile de faire exploser de nombreux pétards !
En savoir plus
- Ahmed Ghayet : Le rôle inexploité des médiateurs de quartiers pour une vraie politique culturelle et sportive
- "une envie de s’amuser et de se retrouver. Il y a une jeunesse qui ne sait pas où se dépenser. La solution est l’éducation, diffusée d’abord par les parents, ensuite par l’école.
- Célébration d’Achoura à Marrakech
- Comme ailleurs au Maroc, des débordements lors de la célébration d'Achoura, malgré les mesures anti-covid (video)
- 2017 - Achoura au Maroc : les trouble-fête
- Les rites d'Achoura et "la route des pétards".
- 2013 - Fièvre de Achoura : Rites et dangers
- Les pétards ne sont pas les seuls dangers lors d'Achoura : les jouets de mauvaise qualité, éventuellement cancérigènes, vont être achetés en grande quantité par des familles pauvres.
- 2017 - Fès: les explosions de pétards atteignent les cours d’école
- 2017 - Dakhla: ils détenaient plus 147.000 unités de pétards et feux d'artifice
- 2016 - Casablanca : saisie de 190.000 pétards dangereux
- Une grosse saisie à Derb Omar, où ces pétards ont des petits noms comme "Messi" ou "Daech"
- 2020 - Dérapages lors de Achoura : interpellation de 157 individus
- Pas une année ne passe sans qu'il y ait des dégâts énormes à cause de pratiques et dérapages accompagnant cette fête[...]Tous les interdits étaient permis. Idem pour des quartiers de l'Ancienne Médina.
- 2017 - Achoura, pétards, argent et dangers
- Mise en place d'un arsenal législatif pour lutter contre l'importation et la distribution de millions de pétards dangereux
- Baba Aïchour est mort, tradition en perdition
- En 2007 déjà, Yabiladi regrette la disparition de Baba Achour
- Achoura 2022 : interpellation de 17 personnes dans plusieurs villes
- Finalement, Achoura n'a pas été si calme que cela. Mais les incidents sont quand même moins nombreux que les années précédentes.
- L’eau de l’Achoura
- Le rituel de "Zemzem" (s'asperger d'eau) se transforme peu à peu. Mais en fait, l'auteur de cet article râle fort mal à propos : l'arrosage de ZemZem est une pratique de type "Carnaval" et celles ci ne sont pas toujours courtoises. Quant à dire qu'Achoura a eu lieu la première fois pour consoler les fils de Hussein de la mort de leur père... c'est folklorique ! Achoura se pratiquait largement avant le schisme, d'une part, d'autre part les enfants de Hussein étaient déjà de jeunes adultes au moment de la bataille de Kerbala, d'ailleurs l'aîné des fils du Hussein est mort avec son père. Hussein avait aussi trois très jeunes enfants, qui sont morts soit à Kerbala, soit en captivité, la même année. Dans les conditions de captivité où était la famille d'Hussein, imaginer qu'on puisse essayer de consoler un enfant de la mort de son père en le faisant jouer avec de l'eau ou en lui donnant des cadeaux, alors que les captifs mouraient de faim... soyons sérieux :)
- Achoura : «Zemzem» en temps de crise de l’eau
- Fait-on Zem Zem ailleurs qu'au Maroc ? Quelle est l'origine de ce rituel sans doute pré-islamique et intégré dans la pratique d'Achoura >
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3 commentaires
Et un article plus récent…
https://snrtnews.com/fr/article/achoura-zemzem-en-temps-de-crise-de-leau-50317
Et l’eau, dans tout ça, de nos jours…
https://aujourdhui.ma/societe/leau-de-lachoura-11361
J’ai le souvenir d’avoir été complètement trempé, dans les années 70, par un seau d’eau lancé par ma vitre ouverte…
On dirait que ça ne se fait plus (même pour les Achoura d’été…)
J’ai été bien arrosée aussi, il n’y a pas si longtemps… par contre l’article me semble un peu fantaisiste sur l’origine d’Achoura !