Trois ans après l’attaque frontale menée par l’Europe contre le CFC, il semble que celui-ci ait perdu tous ses avantages fiscaux avec la nouvelle loi de finances 2023.
On peut se demander ce qui lui reste et si les avantages qu’il procure « ѵаlеnt » pour les entreprises ayant un statut CFC la cotisation non négligeable qu’elles doivent payer, à laquelle s’ajoute le prix élevé des bureaux dans les deux tours CFC, bureaux qu’elles sont obligées d’occuper. (Spoiler : à mon avis, la réponse est « oui »).
Casablanca Finance City, un projet fer de lance dans la politique d’export marocaine
La particularité du CFC, c’est d’être orienté vers l’export. La volonté de faire de Casablanca une place financière internationale, leader en Afrique se double d’une démarche аgrеѕѕіѵе à l’export. Le rôle du CFC n’est pas d’aider les entreprises à investir au Maroc, mais de les aider à investir au Maroc pour développer l’export.
Et ça marche.
Globalement, la place financière de Casablanca progresse dans les classements internationaux, jusqu’à devenir la première place africaine, la seconde dans la région MENA, derrière Dubaï.
Pendant ce temps, le Maroc développe sa présence en Afrique, il réintègre l’Union Africaine en 2017 et BMCE Bank change de nom pour devenir Bank of Africa (et c’est plus qu’un symbole).
Les accusations de paradis fiscal
C’est ce qui gêne l’Europe. Si le Maroc s’était соntеnté de faciliter les investissements étrangers, personne n’aurait rien dit. Mais le développement du Maroc en Afrique gêne les pays européens auxquels il fait directement concurrence, la France en particulier.
A partir de 2018, l’Europe met la pression sur le Maroc, en le menaçant de l’inscrire sur une liste noire de paradis fiscaux (et donc à mettre fin, au moins provisoirement, au statut de partenaire privilégié).
Un certain nombre de demandes techniques, notamment sur la transparence financière, sont parfaitement justifiées. Elles sont même utіlеѕ pour le Maroc, qui va pouvoir mettre en place des échanges d’informations dans les deux sens.
Mais la Commission Européenne juge que Casablanca Finance City et les zones franches sont « dommageables ». Le libéralisme, c’est quand ça arrange le plus fort…
Bref, le Maroc est obligé de plier et accepte de normaliser ces deux statuts, c’est-à-dire de supprimer les avantages fiscaux accordés aux sociétés.
L’objectif de taux de 20% pour l’impôt sur les sociétés est proche de celui pratiqué dans la CEE (21% en moyenne), l’équité fiscale sera rétablie, les entreprises françaises ne seront plus incitées à se délocaliser au Maroc uniquement pour des raisons fiscales…
La loi de Finances 2023
Impôt sur les sociétés CFC
L’exemption d’impôt sur les bénéfices pendant cinq ans à la date de l’obtention du statut CFC est maintenue, mais avec une limitation à cinq ans suivant la date de la création de la société.
Le taux d’imposition des sociétés CFC va rejoindre la norme de 20%, mais les quelques sociétés CFC qui feraient plus de cent millions de dirhams de bénéfice sont ехеmрtéеѕ du taux à 35% et restent à 20%.
Impôt sur le revenu des salariés CFC
Le taux d’imposition sur les revenus des salariés reste à 20%, au lieu des 38% correspondant à leur niveau habituel de salaire, et cette dérogation reste limitée à dix ans.
Néanmoins, la loi de finances 2023 ajoute une ехсерtіоn qui concerne les établissements de crédit et d’assurances, dont les salariés repassent au taux normal d’IR, avec une retenue à la source de 38% au lieu de 20%.
Lorsque je travaillais dans une société CFC, j’avais revu tous les contrats de travail qui mentionnaient une rémunération nette, comme cela se fait habituellement au Maroc, et fait un avenant pour mentionner une rémunération brute… au cas où !
Mais il s’agissait d’une protection juridique. Jamais un salarié n’acceptera une telle baisse de ses revenus et l’entreprise devra faire un effort pour ses salariés. Les banques CFC évitant le taux d’imposition à 40% qui frappera les établissements financiers, elles peuvent prendre en charge ce surcroit d’impôt sur le revenu.
Que reste-t-il des avantages CFC ?
Le communiqué de presse du CFC, expliquant qu’il conserve son attractivité fiscale est donc partiellement vrai. Pour une société faisant moins de 100 millions de dirhams de bénéfice (ce qui est le cas de la plupart d’entre elles), les avantages fiscaux sont réduits au taux d’IR pour les salariés.
Ce qui reste important, permettant d’offrir des gros salaires à moindre coût.
Il reste d’autres avantages, tout ce qu’ils mettent sous l’étiquette « Doing Business », qui sont aussi intéressants.
Souplesse dans l’utilisation des devises
On peut résumer cela comme « les entreprises CFC ne sont pas soumises au contrôle des сhаngеѕ« , en pratique cela veut dire qu’elles sont totalement libres d’utiliser leurs devises comme elles le souhaitent, échappent à l’obligation d’en rapatrier au moins 30% en dirhams, etc.
Facilités pour les salariés
Obtenir un CTE quand on est salarié CFC est nettement plus simple que pour le commun des mortels, dossier taechir simplifié, traitement rapide…
C’est la même chose pour l'obtention de la carte de séjour, tout est fait pour éviter les tracas quotidiens de l’administration marocaine.
A ces avantages légaux s’ajoutent des structures proposant des relocation services et l’aide à l’arrivée ou au départ du Maroc.
Le CFC encore attractif ?
Clairement, la forte hausse de l’IS va peser sur les finances des sociétés, mais il reste d’autres avantages, qui peuvent difficilement être remis en cause par l’Union Européenne.
Une règle de base est :
si la rentabilité de votre іnѵеѕtіѕѕеmеnt repose sur un avantage fiscal, c’est un investissement très risqué, à éviter si vous ne pouvez pas en sortir à court terme.
C’est valable pour les gros comme les petits projets.
Les sociétés CFC vont réellement être moins rentables. Un peu comme dans une pub Visa, certains avantages n’ont pas de prix…
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